Saint Michel, gardien de l'autel
Extrait de "L'Ange Gardien", août 1896 :
L'Apôtre saint Jean parle clairement, dans son Apocalypse, de sept Anges plus beaux, plus puissants que les autres, et ayant le privilège d'entourer le trône de Dieu. A ces anges, l'Église rend un culte spécial : ce sont les sept grands Archanges dont saint Raphaël apprit l'existence à Tobie, en l'honneur desquels les papes Jules III et Pie IV élevèrent, à Rome, une magnifique basilique sur l'emplacement des Thermes de Dioclétien, et à qui une tradition attribue le gouvernement suprême du monde physique et moral, sous la direction de saint Michel, le chef de toutes les hiérarchies célestes.
D'après des docteurs et de savants théologiens, Dieu a aussi confié à chacun de ces Archanges, la garde spéciale de l'un des sept sacrements. Le baptême est assigné à saint Gabriel, la confirmation à saint Uriel, la pénitence à saint Jéhudiel, l'extrême-onction à saint Raphaël, le mariage à saint Barachiel, et l'eucharistie, le sacrement par excellence, à saint Michel, l'ange le plus parfait et le confident de la sainte Trinité.
Comme le fait remarquer saint Liguori, n'est-il pas naturel que saint Michel, ministre ou Ange gardien de Jésus-Christ durant les trente-trois années de sa vie mortelle, soit également le gardien de sa vie eucharistique ? Saint Eutrope ajoute que, dans une révélation, saint Michel lui déclara qu'il était l'Ange gardien de la sainte Eucharistie, et que cette sublime fonction lui avait été confiée par la très sainte Trinité, le jeudi saint, dès que Jésus eut institué cet auguste sacrement. D'autres révélations de la sainte Vierge et de saint Michel, des miracles même, ont plusieurs fois confirmé cette créance de tous les siècles de l'ère chrétienne.
Aussi dirons-nous avec un pieux et savant auteur, M. l'abbé Fierville : « O âme qui aime l'Eucharistie, ton Dieu et ton tout, lève les yeux vers le ciel, ils verront l'Archange Michel abritant de son aile le divin Tabernacle ; apprends de lui à adorer le Dieu caché sous les espèces eucharistiques ; entends-le te conviant à te nourrir de son corps et de son sang qui te communiqueront la force divine et déposeront dans ton être entier le germe de l'immortalité. Mais prends garde, songe à la majesté de Celui qui est caché sous ces apparences, purifie ton cœur avant de t'asseoir à la Table sainte, agis avec discernement, car là encore saint Michel venge la divinité et l'humanité du Verbe fait chair, en terrassant les profanateurs et les ingrats. »
Mais saint Michel n'est pas seulement le gardien de l'Eucharistie, il en est pour ainsi dire le sacrificateur avec le prêtre. De même qu'il arrêta le bras d'Abraham prêt à immoler son fils et pourvut à la victime, disent les commentateurs de l'Écriture, de même c'est lui qui présente la Victime elle-même à Dieu le Père, avec l'encens de nos prières et de nos adorations.
Le prêtre offre, il est vrai, au nom du peuple fidèle, le pain et le vin, mais dès que cette offrande est devenue, entre ses mains, par les paroles de la consécration, le corps et le sang de Notre-Seigneur, c'est un ange qui reçoit l'ordre de la faire agréer au Très-Haut, et cet ange, disent les liturgistes, est saint Michel Archange.
L'Église elle-même a confirmé cette croyance, puisqu'elle fait réciter au prêtre durant l'offertoire cette expressive prière : « Que le Seigneur daigne bénir cet encens et le recevoir comme un doux parfum, par l'intercession du bienheureux Archange saint Michel qui est à la droite de l'autel. » Et après l'élévation, au moment où s'inclinant pour demander à Dieu d'agréer l'immolation de la sainte Victime eucharistique, le célébrant ajoute cette touchante invocation : « Nous vous en supplions et conjurons, ô Dieu tout-puissant, commandez que ces mystères ineffables soient portés, par les mains de votre saint Ange, à votre autel sublime, en la présence de votre divine majesté, afin que, après avoir participé à ces mystères célestes et reçu le très saint Corps et très précieux Sang de votre adorable Fils, nous soyons remplis de toutes les bénédictions et inondés de toutes les grâces du ciel. »
Unissons-nous donc au prêtre priant saint Michel, pendant l'auguste sacrifice de la messe, d'intercéder pour nous auprès de Dieu, notre Sauveur. Demandons aussi à ce céleste gardien de Jésus-Hostie de réveiller notre foi, de fortifier notre espérance et d'exciter dans nos âmes les sentiments du plus ardent amour pour l'Hôte divin qui réside jour et nuit dans le tabernacle de l'autel ; supplions-le surtout, quand nous nous approchons de la table eucharistique, de nous présenter à Notre-Seigneur, de lui offrir notre cœur, et de remplir notre âme des grâces que Dieu réserve à ceux qui, dignement préparés, participent souvent au divin banquet des Anges.
> Extrait de "L'Ange Gardien" n° 4, Août 1896, pp.111-113.