Saint Michel Archange, gardien de la Papauté

Publié le par Clément LECUYER

 

Extrait de "L'Ange Gardien", Septembre 1896 :

 Une croyance générale fondée sur l'histoire du peuple juif, sur celle de l'Eglise catholique et de chacun des successeurs de saint Pierre, assigne toujours saint Michel pour Ange gardien au Pontife régnant. Aussi, depuis saint Pierre jusqu'à Léon XIII, les papes ont-ils rendu au Prince de la milice céleste un culte de prédilection, pour obtenir, par sa puissante intercession, la lumière et le courage dont ils avaient besoin dans le gouvernement de l'Eglise.

 Notre-Seigneur Jésus-Christ, s'élevant glorieusement au ciel, n'a pas laissé ses disciples orphelins ; il a perpétué sa présence dans l'Eucharistie et dans le Pontife romain. Dans l'hostie, nous le retrouvons lui-même, comme aliment et comme victime ; dans le pape, comme docteur infaillible et suprême pasteur, divinement secondé par l'Archange saint Michel.

 Dans le terrible et perpétuel combat de Lucifer contre la Papauté, le successeur de Pierre n'est donc jamais seul pour soutenir l'épouvantable lutte ? Non, répond saint Basile, car Dieu a constitué saint Michel pour Ange gardien du Chef visible de l'Eglise, Ange gardien qui, dans la suite des temps, nous apparaît toujours le protecteur, le conseiller et le vengeur de la papauté. Saint Michel secondera toujours le Vicaire de Jésus-Christ, il combattra pour lui et avec lui, il le soutiendra dans ses preuves, il le fera triompher de ses ennemis.

 Les annales de l'Eglise nous fournissent des preuves évidentes de cette protection.
A l'origine, saint Michel garde la papauté au milieu de la persécution du glaive, persécution brutale de la force matérielle, qui aurait noyé l'Eglise dans des flots de sang, si la main de Dieu n'avait conduit la barque de Pierre.
Dès lors, on voit se réaliser tous les calculs de l'ennemi du Christ ; les puissants du siècle forment des complots pour arrêter les progrès de l'Evangile et étouffer les germes de la sainte doctrine. Les prisons les plus obscures, les chaînes rivées avec soin aux mains et aux pieds des confesseurs, les gardes choisis parmi les plus féroces et les plus aguerris, les glaives les mieux affilés, les promesses les plus séduisantes et les menaces les plus terribles, rien n'est épargné pour assurer le triomphe de Satan et de ses suppôts.
Mais l'Ange de la papauté est là. Il attend la veille du jour où les esprits de ténèbres doivent consommer leur oeuvre d'iniquité. Et alors, à la prière des fidèles, il pénètre dans la prison où Pierre est captif et chargé de chaînes ; il frappe d'aveuglement les émissaires d'Hérode ; il dit au Pontife : levez-vous et suivez-moi. Et aussitôt tous les obstacles disparaissent et Pierre est rendu à la liberté !
L'Eglise est ravie de joie, et c'est à peine si elle croit à son bonheur. Mais il est impossible de le nier : c'est bien le pape qui est délivré de sa prison. Il peut de nouveau faire entendre sa voix à toutes les nations. Son Ange a dit comme autrefois : Qui est semblable à Dieu ?
Il y a plus ; les bourreaux deviennent les victimes ; ceux qui devaient immoler le pape sont soumis à la question et livrés à la mort. Hérode épouvanté prend la fuite et va fixer sa demeure loin du séjour de Pierre.
Ce n'est jamais impunément qu'on s'attaque au rocher inébranlable sur lequel Jésus-Christ a bâti son Eglise.
Voici l'intrépide Léon le Grand en face du terrible Attila. Qui dons fait reculer à sa voix le fléau de Dieu ? Le barbare a vu près de Léon un céleste guerrier brandissant une épée et le menaçant de mort, s'il n'obéit au Pontife désarmé. Lui seul l'a vu, lui-même le déclare à ses officiers, surpris d'une pareille obéissance.
Au IX° siècle, les Sarrasins inondent l'Italie et veulent faire de Rome une cité musulmane, mais le souverain Pontife Léon IV triomphe de l'invasion, grâce à la protection de saint Michel. C'est pour l'attester qu'il fait bâtir, au Vatican, un temple dédié à l'Archange des combats.
Notons encore l'appui que saint Michel donna à Grégoire VII dans ses luttes contre Henri IV, l'inique empereur d'Allemagne. Rome était menacée du feu, de la famine et du pillage, quand elle voit accourir les Normands qui la délivrent. Leur chef visible était Roger Guiscard, mais leur guide céleste était le Prince des Anges.

 Il faudrait résumer la vie de chacun des papes, depuis saint Pierre jusqu'à Léon XIII glorieusement régnant, si nous voulions relater tous les effets de la merveilleuse protection de l'Archange saint Michel, en faveur des souverains Pontifes et de l'Eglise. Voilà pourquoi les papes lui ont érigé tant de sanctuaires et les ont enrichis de si précieuses indulgences ; pourquoi ils lui ont consacré tant d'hymnes et de prières ; pourquoi ils ont recommandé son culte d'autant plus instamment que l'Eglise était plus menacée. Aux jours de schisme et de persécution, à l'heure des plus furieux assauts du monde et de l'enfer, ils se réfugient toujours sous le bouclier de saint Michel, vainqueur de Satan.

 Combien, par exemple, Pie IX, de sainte mémoire, a sollicité et obtenu de faveurs signalées par l'entremise de l'Ange gardien des papes ! N'est-ce pas ce céleste protecteur qui favorisa si merveilleusement sa fuite à Gaëte, puis sa rentrée triomphante à Rome, et qui, jusqu'à la mort du Pontife, le défendit contre ses ennemis frémissants ? il était désarmé, captif, et cependant toujours puissant, toujours respecté. Saint Michel était là pour protéger le Vicaire du Christ. Il en est de même pour son auguste successeur Léon XIII. Puisse-t-il, comme Léon le Grand, refouler les nouveaux barbares, comme il a déjà jeté sur la fin de notre siècle, à l'exemple de Léon XI, une splendeur si grande, que l'histoire pourra nomme le XIX° siècle, le siècle de Léon XIII !

 Oui, saint Michel continue sa mission ; il veille jour et nuit. S'il permet à Satan de nouer des intrigues, il l'empêche de triompher. L'épreuve est parfois longue et douloureuse. Le courage faiblit dans un grand nombre d'âmes ; Jésus-Christ semble sommeiller et la barque de Pierre est violemment agitée par les flots ; mais la barque de l'Eglise ne sera jamais submergée, car son divin pilote commande aux vents et aux marées. Dieu est patient, parce qu'il est éternel ; l'Eglise souffre longtemps, parce qu'elle est immortelle.

 En ce mois consacré à honorer tout spécialement saint Michel, prions ce puissant Ange gardien de notre S. P. le Pape, de veiller plus particulièrement sur lui, de le fortifier, de le consoler, à l'heure où il est en butte aux traits et aux pièges de ses ennemis. Qu'il triomphe de l'enfer, pour la plus grande gloire de Dieu et de sa sainte Eglise !

> Extrait de "L'Ange Gardien" n° 5, Septembre 1896, pp.146-151.